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Critique de Fate/stay Night [Réalta Nua]

» par LordFay le
2012-01-03 02:31:34
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Note : j'ai supposé ici que vous aviez déjà une vague idée de ce qu'est un visual novel, et de ce qu'est Fate/Stay Night. Si ce n'est pas le cas...

A la racine de la gargantuesque licence Fate, fer de lance du studio Type-Moon (Kara no Kyoukai, Tsukihime), on trouve Fate/Stay Night. Visual novel (VN) connu s'il en est, FSN partait pourtant lesté des boulets habituels que trimballe ce support ingrat : graphismes et musiques techniquement très modestes, écriture souvent médiocre (la faute à Nasu ou aux traducteurs ? Sûrement un peu des deux), personnages clairement typés "otaku-friendly"... Pourtant FSN s'est démarqué de bien belle manière. Pour expliquer ça, il faut chercher du côté des quelques bonnes idées, chez les personnages ou dans le scénario, mais aussi et avant cela dans la cohérence de la réalisation.

A l'instar de l'anime qui a découlé du soft, FSN est lent dans son début. Très lent. Il faut plusieurs heures de jeu avant de véritablement l'apprécier. Une fois ce cap passé, on commence à voir ce qui fait tout son charme, point que j'ai encore du mal à exprimer - à défaut de mieux, je l'appellerais son ambiance. Le jeu se découpe grossièrement en passages tranche de vie, le jour, et séquences de combat ou de recherche, la nuit. Qu'on soit bien d'accord, hein, c'est un VN pur et dur, donc la seule forme d'interactivité qu'on vous propose, ce sera quelques choix par-ci par-là - pas question ici de brandir l'épée de Saber ou de la diriger comme dans un RPG.

Les passages de nuit sont ceux qui m'ont convaincu le plus vite. Parce que la musique, aussi basique soit-elle, est redoutablement anxiogène et a su me stresser et me coller à mon écran, impatient de savoir ce qui se tramait. Parce que l'écriture, aussi maladroite puisse-t-elle s'avérer, est parfaitement adaptée à la description de l'appréhension, de l'inquiétude, et de l'intensité des combats. On y croit, on aime ça et on en redemande. Quant à la tranche de vie diurne, elle a l'avantage de nous rapprocher des personnages et de nous y attacher : indispensable pour que le reste fonctionne. Tantôt capté, tantôt ennuyé, on la lit et elle passe, parfois un peu trop lourde ; ce n'est que plus tard qu'on en réalise l'importance. Il faut de plus souligner l'arrière-goût de guerre du Graal qui prédomine - on vit avec Saber qui n'est tout de même pas n'importe qui, aux côtés de Rin mi-amie, mi-adversaire, et de Sakura qui est bien difficile à cerner... Ajoutez à cela les diverses préoccupations qui sapent le moral des protagonistes et le résultat est parfois plus intéressant qu'il n'y parait au premier abord.

Si le jeu se résumait à sa première route Fate (celle qui a été adaptée en anime, centrée sur Saber), je pourrais presque m'arrêter là. Certes, elle a quelques bons moments, mais elle comporte trop de longueurs et de mauvais choix scénaristiques, et sa morale est beaucoup trop naïve pour être digne d'intérêt. Elle a par contre le mérite de m'avoir intéressé à l'univers : elle pose de nombreuses questions qui ne trouvent leur réponse que dans les autres routes. Fate a quelques qualités mais au final elle n'est qu'une vaste introduction qui plante le décors ; maintenant qu'on a vu la face la plus sobre et optimiste de la guerre du Graal, on a envie de voir ce qu'il advient quand un peu plus de fourberie fourre son nez là-dedans.

La seconde route, Unlimited Blade Works (qui a été adaptée en film - centrée sur Rin), justifie largement l'attente. On y retrouve évidemment les mêmes éléments de base que la première mais le scénario est à la fois plus intéressant et mieux construit. La tension monte, les personnages se retrouvent de plus en plus acculés, les combats sont de plus en plus désespérés... et de plus en plus épiques. Le talent de Nasu à nous faire vivre un duel avec les quelques moyens qu'il a à disposition est impressionnant. Cerise sur le gâteau, la romance d'UBW est nettement plus acceptable que celle de Fate, et Rin a beau être un personnage des plus classiques, son développement est tout à fait correct et satisfaisant. C'est la route la moins criticable, la plus efficace, la mieux pensée.

Enfin vient Heaven's Feel (jamais adaptée, centrée sur Sakura), qui diffère beaucoup de ses prédécesseurs en ce qu'elle introduit des personnages nouveaux, lesquels n'avaient pour ainsi dire pas fait mine d'exister jusque là. L'ambiance n'est plus à la tension mêlée d'épique, mais à la tension mêlée de malsain. Malsain qui, je dois l'avouer, repose partiellement sur quelques couches de pathos pour le moins bourrin ; je me suis complètement laissé happer mais un lecteur plus aguerri risque de rester un peu froid. Quoi qu'il en soit, plus on avance, plus on déroule les noirs secrets de la Guerre et de certains personnages ; avec avidité, on en apprend de plus en plus. De sérieux couacs apparaissent dans l'histoire, pour qui a lu Fate et UBW au préalable, et relancent l'intérêt - des choses se passent de façon mystérieuse, inquiétante, et on est invités à suivre Shirou dans une sorte de descente aux enfers doucement jubilatoire.

Cette troisième route souffre d'un petit passage à vide, ceci dit - certaines scènes sans intérêt s'éternisent là où on ne veut qu'avancer dans le scénario et dans les révélations. Tant pis. En guise de pardon, Heaven's Feel s'offre une fin rocambolesque et réveille l'épique : les deux derniers jours sont véritablement haletants, chargés d'un suspens rare. De manière générale, c'est au cours de Heaven's Feel que j'ai réalisé à quel point je m'étais attaché aux personnages, à quel point ils m'étaient chers (j'en suis venu à apprécier Shirou, c'est dire...) ; les 50h de jeu qu'il faut pour atteindre la fin et le caractère paroxysmique de celle-ci sont les ingrédients d'un cocktail émotionnel des plus intenses. Le bouquet final est splendide.

Voilà ce qu'il en est. Des CG modestes, mais inspirés et parfois poignants. Des OST simples, mais marquantes et efficaces. Une écriture lourdingue, mais capable de nous rapprocher de l'action avec brio. Un début trop lent, mais une ambiance soignée et quelques excellentes scènes. De nombreux défauts que viennent éclairer de larges qualités. A ceux qui se sentent tentés, je conseillerais simplement de commencer par l'anime ; il suffit de l'apprécier modérément pour aimer le film, et adorer le jeu. Fate/Stay Night n'est pas une œuvre et ne captera pas tout le monde, mais il restera pour moi une expérience forte et inoubliable : je veux croire qu'une production qui a su me transmettre autant d'émotion ne peut pas être vide.

Verdict :9/10
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A propos de l'auteur

LordFay, inscrit depuis le 09/09/2010.
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