Minna no Monogatari — Pokémon, attrapez-les, c’est notre histoire

» Critique de l'anime Pokemon 21 : Minna no Monogatari par Deluxe Fan le
14 Janvier 2019
Pokemon 21 : Minna no Monogatari - Screenshot #1

L’an dernier nous avions discuté du vingtième film Pokémon Kimi no Kimeta, qui représentait un nouveau départ pour la franchise en choisissant de rebooter l’histoire de Sacha et Pikachu pour les emmener dans une direction différente de celle que l’on avait toujours connu. Ce reboot débouche donc sur une nouvelle continuité, un genre de timeline alternative qui se développe à côté de celle de la série télé. Et avec Minna no Monogatari, on peut commencer à voir quel genre d’apport cette nouvelle saga peut essayer de proposer.

Le récit se déroule à Fula City, une métropole dans laquelle se tient un festival en l’honneur du Pokémon légendaire Lugia auquel est attribué le vent qui permet à la ville de se fournir en énergie renouvelable. Lorsque Sacha et Pikachu arrivent sur place, l’humeur est à la fête jusqu’à ce qu’une série d’évènements gâchent les festivités et mettent en danger la ville et ses habitants. Pour éviter un désastre, un petit groupe d’individus vont devoir faire preuve de courage et dépasser leurs peurs et leurs préjugés. Qu’ils n’aient crainte cependant, car ils sont aidés de leurs Pokémon, et avec les Pokémon, tout est possible bien entendu.

Pokemon 21 : Minna no Monogatari - Screenshot #2En général les films Pokémon suivent la même structure, avec Sacha qui débarque dans un bled où traîne un Pokémon légendaire, puis des évènements surviennent qui poussent ledit légendaire à intervenir et ainsi faire saliver les gosses dans la salle de cinéma qui ne peuvent pas attendre de recevoir leur code promo pour le télécharger dans leur jeu une fois rentrés à la maison. Minna no Monogatari n’est pas très différent, puisqu’une bonne partie du film consiste à sucer la Pokébite de Zeraora, un tout nouveau Pokémon dont vous n’avez jamais entendu parler puisqu’il a été créé spécialement pour le film. De même le scénario à base de rebondissements sortis toutes les cinq minutes du chapeau des auteurs montrent que ce n’est pas vraiment là où on va trouver de l’intérêt, contrairement au précédent film qui retravaillait le début de la saga et donnait lieu à des séquences intéressantes.

Pour comprendre l’intérêt du film, il faut passer au second niveau de lecture ce qui va m’obliger à enfiler ma casquette de Pokénerd que j’avais rangé au placard il y a bien des années en même temps que ma collection de fanarts NSFW de Gardevoir. Vous avez été prévenues les filles, c’est votre dernière chance de quitter cet endroit avant que ne vous soyez vraiment dégoûtées. Les autres, accrochez-vous.

Pokemon 21 : Minna no Monogatari - Screenshot #3Le titre du film « Minna no Monogatari » signifie littéralement « Notre histoire à tous » et c’est une référence à un autre film, le fameux deuxième film dont je parle pratiquement à chaque fois que je commente un truc lié à Pokémon, ce n’est pas ma faute, c’est comme si la totalité du Pokéverse tournait autour de ce truc. Ce deuxième film avait pour titre Maboroshi no Pokemon Lugia Bakutan (La Révélation du Pokémon Fantôme Lugia) mais il est beaucoup plus connu sous son titre américain The Power of One ou en français Le Pouvoir est en Toi. En effet, ce film était une aventure épique où Sacha sauvait littéralement le monde d’une catastrophe climatique en devenant « L’Élu » du monde des Pokémon. Par ailleurs, ce film avait également Lugia comme mascotte et se déroulait durant la deuxième génération (entre la première et la deuxième pour être précis), ce qui est là aussi référencé dans ce nouveau film puisque la totalité des Pokémon montrés à l’écran viennent aussi de la deuxième génération. Enfin, ce nouveau film est le deuxième dans la nouvelle continuité, ce qui là aussi boucle avec The Power of One qui était le deuxième film de la saga.

Pokemon 21 : Minna no Monogatari - Screenshot #4Ce lien méta-narratif entre les deux films, qui n’est absolument pas un hasard, permet de mettre en lumière la différence de ton et de propos entre le Pokémon d’il y a vingt ans et celui d’aujourd’hui. Autrefois Pokémon était une aventure épique, où un gosse parti de son patelin de merde allait découvrir le monde et se confronter à ses dangers aux cotés de ses bestioles pour finir par tous les attraper, sauver le monde, devenir le meilleur dresseur et je me battrai sans répit blablabla vous connaissez la chanson. Aujourd’hui ce n’est plus du tout cela Pokémon, c’est devenu plutôt un genre de réseau social qui sert de plateforme de rencontre entre les gens. Un truc comme Pokémon GO a permis à des individus d’âges, de milieux et de cultures très différents de se retrouver autour d’un même jeu et de partager ensemble. Il ne s’agit plus de vivre son aventure épique seul dans son coin, mais de participer tous ensemble à un même effort collectif.

Minna no Monogatari intègre cette nouvelle conception de la franchise dans son écriture. Sacha n’est plus un héros, c’est un mec parmi les autres qui contribue à sa hauteur. Les vraies stars du film sont les divers personnages qui interviennent pour représenter la diversité des fans de la franchise. On a ainsi un scientifique nerd avec des cheveux longs qui a un problème de timidité excessive (me rappelle quelqu’un lui), un homme d’âge mûr qui s’invente une vie pour combler un manque affectif, une vieille dame aigrie qui vit sur un souvenir douloureux, ou encore cette meuf gyaru qui se maquille comme une voiture volée pour masquer son manque de confiance en elle. Chacun de ces persos aura son arc et sa résolution, et sans que ce soit de la grande psychologie c’est rafraîchissant de voir dans une franchise telle que celle-ci des personnages aussi simples à comprendre, à s’identifier. Leurs problèmes ne sont pas liés à des considérations compliquées liées au lore de la série, c’est des gens normaux comme on pourrait en croiser dans la rue qui ont exactement les mêmes problèmes que nous sauf que ça se passe dans le monde de Pokémon.

Pokemon 21 : Minna no Monogatari - Screenshot #5D’ailleurs, Minna no Monogatari est probablement un des films les plus immersifs de la saga, on a vraiment l’impression de voir ce que cela donnerait de vivre dans le monde des Pokémon pour de vrai. A un moment on a par exemple ce plan de coupe sur l’intérieur d’un wagon de métro, ça ressemble exactement à ce que vivent les gens qui prennent le métro le week-end pour sortir ou je sais pas quoi, sauf qu’au fond de l’image t’as un mec qui prend un selfie avec son Carapuce. C’est ce genre de détail qui fonctionne dans ce film, on est plongé dans un univers qui est exactement le nôtre mais avec un truc en plus qui nous donne envie de préférer cet univers à la réalité ; et c’est pour cela que l’on a aimé Pokémon à la base, et ce film l’a complètement compris.

On ne va pas s’étendre sur les visuels, c’est très beau, l’animation des personnages et des Pokémons en particulier est très fluide et expressive comme on peut s’y attendre de la part d’un film par rapport à une série télé. C’est toujours le studio OLM qui se charge de la production mais avec la collaboration exceptionnelle de Wit Studio, c’est-à-dire les mecs en charge de l’adaptation de Shingeki no Kyojin dont la saison 3 a été diffusée il y a quelques semaines. On imagine que le contact avec un matériel aussi prestigieux et qualitatif que Pokémon les a pas mal bousculés par rapport à ce dont ils ont l’habitude.

Je viens d’écrire 6500 signes d’une critique d’un film Pokémon, vous comprenez désormais pourquoi j’ai autant de difficultés avec les filles. Cela montre toutefois que cette franchise, prise par le bon bout, peut se révéler aussi intéressante à analyser que n’importe quelle autre. En tout cas cette nouvelle orientation prise par les films Pokémon me plaît bien pour l’instant, et celui-ci en particulier avec son fan-service pour les fans de la deuxième génération tels que moi a coché toutes les cases de la réussite. Comme quoi Pokémon, même à notre âge, un voyage d’apprentissage.

Verdict :7/10
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A propos de l'auteur

Deluxe Fan, inscrit depuis le 20/08/2010.
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