NEVERLAND — Les enfants si vous voyez, des p’tits oiseaux prisonniers, ouvrez-leur la porte vers la liberté…

» Critique de l'anime The Promised Neverland (TV 1) par Deluxe Fan le
23 Avril 2019
The Promised Neverland (TV 1) - Screenshot #1

Yakusoku no Neverland est un des derniers mangas à succès du Weekly Shônen Jump, le célèbre magazine de prépublication qui est actuellement en pleine période de transition. Après la fin de Naruto et de Bleach, et alors que le vénérable One Piece s’achemine désormais sûrement vers son propre dénouement, il est devenu nécessaire de poser les bases de ce que seront peut-être les dix prochaines années du magazine. C’est une bonne chose pour les amateurs du genre, puisque cela force le Jump à expérimenter et donner sa chance à de nouvelles idées - et il y a fort à parier que sans ces circonstances, on aurait beaucoup moins entendu parler de Neverland.

Emma, Norman et Ray sont trois enfants pensionnaires d’un vaste orphelinat situé au milieu de nulle part. Ils passent leur journées à étudier et jouer sous la supervision de Maman, la seule adulte qu’ils côtoient. Un jour, une des filles de l’orphelinat quitte la maison pour intégrer sa nouvelle famille. Elle est suivie en cachette par Emma et Norman, qui font une sinistre découverte. L’orphelinat et Maman ne sont pas ce qu’ils croyaient, et il devient impératif de s’échapper de cette maison des horreurs…

The Promised Neverland (TV 1) - Screenshot #2Cette première saison de Neverland, adaptée du premier arc du manga, est ainsi entièrement consacrée à relater la tentative des enfants de fuir cet orphelinat qui ne leur veut pas du bien. On peut penser aux films d’évasion, qui sont une catégorie à part entière du cinéma hollywoodien ; ou alors à des récits pour adolescents comme le premier film Maze Runner par exemple. En réalité si on veut comprendre exactement de quoi Neverland parle, il suffit de regarder ce qui est marqué sous nos yeux mais que personne ne voit.

Ce que Neverland raconte, c’est ce qui a été théorisé par Tsugumi Ôba et Takeshi Obata (les auteurs de Death Note et Bakuman) sous l’appellation de shônen de combat sans combat. En effet la brique primordiale du shônen, son ingrédient principal, c’est le combat – ou la confrontation pour être précis. Sauf que le combat peut venir en plusieurs formes différentes. Il y a le combat direct, avec les personnages qui se tapent dessus avec ou sans pouvoirs, qui forme la base du genre. Le combat peut également être un match ou une confrontation de performances sans affrontement direct, ce qui est le cas des mangas de sport par exemple. Enfin le combat peut être complètement indirect, il peut s’agir d’un affrontement d’idées ou de concepts intellectuels et artistiques, ce que serait Bakuman justement, mais également Neverland donc.

The Promised Neverland (TV 1) - Screenshot #3L’intrigue de Neverland relève donc bel et bien du combat, le combat de ces gosses contre cette institution étrange et dangereuse, aux méthodes bizarres et sournoises. Il s’agit de comprendre les techniques de l’adversaire, de trouver un moyen de les contrer tout en exécutant son propre plan. De plus la condition de victoire du combat n’est pas ici la défaite de l’adversaire, mais la fuite. Ce n’est vraiment pas différent d’autres mangas aux combats très élaborés tels que JoJo ou HxH qui eux aussi manipulent ces notions et poussent le genre dans ses retranchements.

Non seulement Neverland vient s’inscrire dans un type de shônen très spécial, mais il le fait de manière remarquable. L’intrigue en elle-même est relativement simple mais l’écriture en tire le maximum, ce qui est le signe que l’auteur maîtrise son sujet. On apprécie que contrairement à une certaine autre série au succès titanesque, Neverland ne nous fait pas miroiter le méga-plotwist-de-la-mort-qui-tue pendant des années pour finalement tomber dans l’OSEF total dès qu’il s’agit de raconter quoi que ce soit. Ici les enjeux sont posés très tôt et de manière très claire, ce qui oblige la série à respecter son public et faire avancer son scénario de manière sérieuse. Pareillement et là encore au contraire de cette certaine série susmentionnée, les obstacles en apparence insurmontables que l’intrigue pose à nos héros ne sont pas réglés par un nouveau pouvoir sorti du trou de balle du scénariste mais simplement par un regard différent sur le problème, ce qui prouve la qualité de l'écriture.

The Promised Neverland (TV 1) - Screenshot #4Ce qui nous amène à parler de la réalisation, et là aussi Neverland illustre cette nouvelle et récente manière d’adapter le shônen. Autrefois dès qu’un manga avait la moindre petite étincelle de popularité on partait direct sur des feuilletons de 200+ épisodes, quitte à remplir avec du filler lorsque le matériel venait à manquer. Cela donnait ces séries énormes et indigestes, à la qualité inégale, que tout le monde connaissait mais que personne ne regardait. Tout le monde connaît Naruto, tout le monde a vu Naruto, mais personne n’a fini Shippûden parce qu’au bout de 450 épisodes t’en as ras le cul et tu vas lire le manga. Cette manière de procéder, populaire dans les années 2000, a fait son temps. L’industrie a évolué vers quelque chose de plus respectueux des œuvres et de leur public, privilégiant la qualité plus que la quantité. Même les titres populaires du Jump sont maintenant adaptés par des studios de première classe en petites tranches de douze épisodes, pour s’assurer d’un haut niveau de qualité dans la production et la mise en scène : One Punch Man, My Hero Academia, etc.

En l’espèce Neverland est produit chez CloverWorks, une filiale de A-1 Pictures dont la précédente production était le médiocre Persona 5 The Animation ; on peut d’ailleurs raisonnablement penser que le budget qui avait été versé au studio pour adapter P5 a été détourné pour améliorer Neverland, ce qui est une très bonne chose. L’anime est beau, très agréable à l’œil, avec une direction de l’animation excellente qui met l’accent sur le jeu des personnages ; parce que c’est le plus important. Un soin particulier est notamment apporté aux expressions faciales et autres rictus, parce qu’ils servent le double objectif de transmettre les émotions des personnages entre eux, mais aussi à tromper le spectateur sur ce que les héros pensent vraiment… Au poste de réalisateur on trouve Mamoru Kanbe, qui est un vétéran du milieu et possède une expérience dans le domaine des animes malsains et angoissants tels que Elfen Lied et The Perfect Insider (je viens aussi de voir qu’il avait réalisé Kikôshi Enma, une excellente minisérie d’OAV librement inspirée des personnages de Go Nagai, je vous la conseille si vous aimez les trucs un peu morbides). C’est là aussi l’avantage de traiter les adaptations de shônen comme des animes de prestige, ça permet d’appeler des réalisateurs et du staff top niveau et ça fait plaisir quoi.

Neverland est une série d’une grande efficacité et dont la popularité n’est absolument pas usurpée. La manière avec laquelle l’anime est conçu respire la compétence et il est pratiquement impossible de finir un épisode sans avoir envie de lancer le suivant. Ce qui pose d’ailleurs le souci de savoir que la saison deux n’arrivera que l’année prochaine, Noitamina oblige. Toutefois si cette attente est le prix à payer pour avoir du produit de haute qualité, alors on attendra ; tout comme les délicieux cerveaux des jeunes enfants, il faut savoir patienter avant de récolter.

Verdict :8/10
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A propos de l'auteur

Deluxe Fan, inscrit depuis le 20/08/2010.
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