MEGALOBOX — One Punch Dog

» Critique de l'anime Megalo Box par Deluxe Fan le
02 Décembre 2018
Megalo Box - Screenshot #1

En 1968 fut publié dans le Weekly Shônen Magazine le premier chapitre de Ashita no Joe, une œuvre culte considérée encore aujourd’hui comme une référence indépassable du shônen manga et qui a signé l’acte de naissance de la popularité des séries sportives. L’histoire de ce jeune boxeur parti de rien et luttant jusqu’au bout pour la victoire résonna profondément avec la mentalité japonaise de l’époque, qui voyait le pays se reconstruire après avoir perdu la guerre.

Cinquante ans plus tard, ce n’est plus le même genre d’esprit que l’on retrouve dans les animes de sport. Il n’y en a que pour les filles, les gays et les dalleux en sueur, tandis que nous les vrais hommes restons au bord de la route sans même un gilet jaune pour nous faire remarquer par cette industrie qui a depuis longtemps oublié ses racines.

Et puis il y a Megalobox. Il a pas oublié lui, Megalobox.

Megalo Box - Screenshot #2Dans un futur lointain, le sport à la mode est la Mégaloboxe, qui est une version de la boxe identique à celle que l’on connaît aujourd’hui sauf que les mecs sont équipés de Gears, des orthèses mécaniques qui augmentent leur force et rendent les combats plus violents. La corporation Shirato, leader sur le marché du Gear, entend faire sa pub en organisant un grand tournoi de qui réunira les plus grands combattants, Mégalonia.

Pendant ce temps, Junk Dog est un gamin qui fait son beurre en participant à des matchs truqués de Mégaloboxe dans les rings souterrains des quartiers mal famés. Suite à sa rencontre fortuite avec Yuri, le champion de la Shirato, il décide de tout faire pour participer à Mégalonia. Sauf que Junk Dog n’a pas de sponsor, pas de Gear, et même pas d’état civil. Qu’à cela ne tienne, il entrera sur le ring avec ses seuls poings, sous le nom d’emprunt de « Joe ».

La première chose qui choque avec Megalobox c’est évidemment la mise en scène. Celle-ci est incroyable et emprunte énormément aux travaux de Takeshi Koike et aux derniers animes Lupin the Third, également produits par le studio TMS. Un chara-design rugueux et détaillé, soutenu par une animation d’une remarquable constance rendent la série magnifique à regarder. Mais le plus impressionnant se situe peut-être dans les décors et les designs qui reflètent parfaitement ce style sale et crade du cyberpunk, tout comme la bande-son électro-pop aux relents de hip-hop et de guitare acoustique, nous ramenant là aussi à la musique de rue, opérant donc le lien avec le sujet de la série. En termes de direction artistique et de réalisation, on est probablement dans ce qui s’est fait de mieux cette année.

Megalo Box - Screenshot #3Le scénario quant à lui est très classique et raconte simplement l’ascension de Joe dans le tournoi de Mégaloboxe, envers et contre tous. La série contient peu de personnages, ce qui permet de se concentrer sur l’essentiel et de doter chacun des protagonistes de l’épaisseur nécessaire pour les rendre marquants, à commencer par Joe superbement interprété par le doubleur Hosoya Yoshimasa, qui s’était fait connaître il y a quelques temps grâce à un rôle similaire d’underdog rempli d’ambition. Les deux acolytes de Joe, son coach Nanbu et le gosse Sachio, sont également très attachants et leurs caractères se complètent bien. Les adversaires successifs de Joe débordent de charisme et de personnalité, sans tomber jamais dans le grand-guignol ou la caricature. Tout ici sonne juste, on est dans la sincérité et la vérité du nekketsu : se dépasser, se relever, et gagner.

Au-delà de tout ceci, pour trouver la substance de la série il faut monter au deuxième voire au troisième niveau de lecture. Cette idée du challenger dépourvu de technologie qui avance dans un milieu où la technologie est reine est une métaphore à peine déguisée de l’animation japonaise ; une industrie qui pour des raisons productivistes a abandonné son savoir-faire pour se tourner vers les sirènes de la modernité que sont les images de synthèse. Et Megalobox ne balance pas ce genre de message à la légère, puisque son animation à elle est quasiment dépourvue d’effets numériques et prouve de manière indiscutable la supériorité de l’animation traditionnelle sur l’artificialité et la froideur des CG que l’industrie cherche à tout prix à nous faire avaler pour nous préparer à la lente destruction de son intégrité artistique.

Megalo Box - Screenshot #4L’autre message caché de Megalobox se révèle lorsque l’on jette un coup d’œil au staff de la série. Pour pondre un tel anime aussi radical dans sa mise en scène et réussi dans son ambition, il faut nécessairement avoir dans l’équipe quelqu’un qui a de la bouteille et une expérience de ce genre d’exercice. Mais à bien y chercher, rien de tel. Le réalisateur Yô Moriyama est animateur de profession et n’avait jamais réalisé de série jusque-là. Pareil pour le chara-designer Hiroshi Shimizu plus connu pour son travail d’animateur que de designer. Les scénaristes crédités au générique sont de parfaits inconnus et le compositeur mabuana est un musicien dont il s’agit de la première collaboration sur un anime.

Pour être honnête, certains commentateurs avaient du mal à croire qu’une série telle que Megalobox ait pu être produite par une bande de débutants et allaient même jusqu’à penser qu’il s’agissait de pseudonymes cachant des stars du milieu. Pourtant lorsque l’on considère ce que raconte l’anime, cela va de soi ; ces animateurs, ces artistes inconnus, ce sont eux les vrais créatifs dans l’animation japonaise. Tout comme Joe sort de nulle part et grimpe les rangs pour tutoyer les champions, le staff de Megalobox sort de nulle part et non seulement piétine la concurrence des autres studios, mais ils regardent en face l’héritage de Ashita no Joe pour prouver qu’en bas, quelque part, certains se souviennent de pourquoi on a un jour aimé tout ça.

Avec seulement treize épisodes, un style marqué et abouti, et une histoire simple qui a un début et une fin, Megalobox semble en faire peu mais en réalité il en fait énormément. Tomber en 2018 sur un tel anime c’est comme quand tu rentres chez toi le ventre vide, t’as pas eu le temps de faire les courses alors tu fouilles dans tes placards et tu trouves un sachet de nouilles instantanés saveur poulet teriyaki à côté d'un rouleau de Pringles entamé. C’est pas grand-chose, c’est juste pour dépanner, mais ça fait plaisir putain.

Verdict :8/10
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A propos de l'auteur

Deluxe Fan, inscrit depuis le 20/08/2010.
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