Anime-Kun - Webzine anime, manga et base de données

L’Histoire du Japon, les femmes fleurs (3/3)

Publié le 10/03/2009 par SucreDeLune dans Culture - 15 commentaires

Au Japon, la prostitution est illégale depuis 1956. Néanmoins, le commerce du sexe (englobé dans le terme mizushoubai 水商売) continue à prendre une part importante dans l’économie japonaise : 1% du PIB national, soit l’équivalent du budget pour la défense du territoire. Certes, il faut compter avec les réseaux clandestins de prostitution, organisés par les yakuza (任侠 mafia japonaise), qui emploient pour la majeure partie des Philippines et des Thailandaises, mais cette importance financière suggère l’existence d’autres structures plus officielles. En effet, lorsque les maisons closes furent fermés, la société japonaise se dota de nouveaux commerces. La culture visuelle japonaise ayant largement exploité ces lieux comme cadres narratifs, les connaître et les différencier est donc intéressant.

Host Club, un manga mais aussi des bars bien spéciaux

Host Club

Host Club : Le lycée de la séduction (Ōran kōkō Host club, 桜蘭高校ホスト部) est un manga de Bisco Hatori, racontant l’histoire de Haruhi Fujioka, embauché de force dans le « club d’hôtes » de son lycée. Là, de jeunes et séduisants lycéens passent du bon temps avec les étudiantes assez riches pour payer leurs services. Loufoque ? Pas au Japon. En effet, Host Club reprend le fonctionnement même des host club japonais, bars à hôtes ou bars à hôtesses. Il en existe de deux sortes : des bars de haute qualité, qui s’appellent kôkyûbâ (高級バー), pour lesquels il faut compter entre 190 et 430 euros par heure, et des bars de moindre qualité, les teikyûbâ (低級バー), entre 70 et 100 euros de l’heure.

Un parallèle intéressant se retrouve d’abord dans les structures sociales impliquées. Il est d’avis général que les salarymen japonais sont la réplique sociale moderne des samurai d’antan ; il en est de même avec les hôtesses de bar, chez qui il existe la même hiérarchie que chez les anciennes geishas (celles travaillant pour les bars de plus haute qualité portent même le kimono). Comme les geishas, ces hôtesses sont formées à l’art de la conversation ; elles sont très cultivées, pour pouvoir ainsi répondre à n’importe quel interlocuteur, et leur politesse atteint des proportions artistiques. Les débutantes dans la profession sont tenues de se taire devant les clients, se contentant d’observer les procédés de leurs aînées.

Les clients sont d’abord attirés par un puller, un homme qui invite les passants à entrer. Une autre façon d’attirer la clientèle consiste en la distribution de flyers, de magazines, présentant les employées (ainsi que les employés masculins, pour les bars à hôtes). Les clients sont ensuite accueillis par la dirigeante du bar, appelée familièrement mama-san (la mère des hôtesses), qui fixe les tarifs et les dirige vers ses employées. Celles-ci doivent séduire leurs clients de façon à les distraire, mais surtout pour les pousser à consommer de plus en plus, et des boissons haut-de-gamme.

Magazines...

Jusque-là, il n’y a pas de relation ambigue, l’hôtesse se comporte comme une geisha. Les clients peuvent l’inviter à dîner hors du bar ; ce rendez vous est nommé le dohan (同伴), et chaque hôtesse est tenue à en assurer un certain nombre par mois. C’est lors de ces dohan que l’hôtesse peut, si elle le désire, offrir un service sexuel à son client ; elle passe alors d’hôtesse à prostituée. Il faut garder à l’esprit que ce genre de cas est plutôt rare, et surtout pratiqué dans les bars de seconde catégorie. Néanmoins, cet accord n’est pas considéré légalement comme de la prostitution, car il s’effectue en dehors du cadre de travail de l’hôtesse ; et chaque personne est libre de faire ce qu’elle désire…

Quelle est la loi réelle ?

En 1956, après la lutte de groupes féministes, une loi anti-prostitution est votée. Elle est appliquée en 1958. Mais cette loi n’a jamais été créée pour être prise au sérieux. Au lieu que les bordels s’appellent bordels ou maisons closes, ils sont devenus des bars à hôtesses de seconde zone ou des soapland.  Les Japonais considèrent la prostitution comme un service social nécessaire. Le mizushoubai (commerce du sexe) constitue une partie essentielle de la vie des affaires, parce que l’on peut réaliser des accords dans une atmosphère agréable. Du coup, au Japon, il n’est pas interdit d’acheter le sexe, mais on ne peut pas vendre son corps.
L’abus sexuel d’une hôtesse n’est reconnu qu’en 1989, avec l’utilisation du terme sekuhara (セクハラ) dans un contexte juridique. D’abord, il faut remarquer que ce terme est un dérivé de l’anglais sexual harrassment, donc qu’il représente un concept totalement étranger au Japon. Dans un article, la journaliste Yukiko TSUNODA montre que la loi japonaise ne mentionne nulle part l’abus sexuel ou sekuhara. Si une femme souhaite prouver qu’elle a été victime d’abus, elle doit démontrer que c’était arrivé à un homme l’acte serait considéré comme un crime (et alors, l’égalité des sexes ne serait plus respecté si ce qui est un crime pour un homme ne l’est pas pour une femme). S’il est dur pour une Japonaise de gagner un procès lié à un sekuhara, on peut s’imaginer que c’est encore plus difficile pour une hôtesse, qui est considérée comme une prostituée.

On ne peut évoquer la position juridique des bars à hôtesses sans rappeler le cas de Lucie Blackman. Cette jeune Anglaise travaillait pour un bar et a été assassinée, ce qui a ému toute l’opinion internationale. Pourtant, des hôtesses asiatiques subissent des violences quotidiennement.

Les soaplands, bordels reconnus et légaux

Le soapland (littéralement, la maison du savon ; ソープランド sôpurando) est un club réservé à des membres payant une cotisation (étant plus ou moins chère selon la qualité du club). Généralement, il consiste en un établissement de bains, où les employées lavent les clients. La procédure est ritualisée, comme dans les anciennes maisons closes : la femme lave l’homme, puis a lieu un massage spécial sur un matelas en plastique (le massage étant à base de savon, d’où le nom de l’endroit) ; l’homme peut ensuite réclamer les faveurs de l’employée. Il faut préciser que l’employée n’est pas appelée prostituée mais compagnon. De plus, même s’ils sont plus rares, il existe des soaplands réservés aux femmes. Dans le manga et l’anime, ces lieux sont restés plutôt peu usités (ou alors, pas définis comme tels ; évidemment, cela sans tenir compte des productions à caractère pornographique). Néanmoins, si l’on peut voir un exemple de l’utilisation des soaplands comme lieux sociaux du Japon, il existe un passage du manga Saru Lock (Naoki SERIZAWA), où le héros découvre un ami à lui dans une salle d’eau, couvert de savon, en la compagnie d’une prostituée… De plus, le film Wicked City (Madhouse, 1987) prend un soapland pour cadre d’un de ses passages.

Wicked City

Le cas de l’enjo-kôsai (援助交際) et l’industrie de la pornographie avec des symboles infantiles

A Tôkyô, il est fréquent de croiser des hordes de lycéennes ; ça ne diffère pas trop des villes occidentales. Mais ce n’est pas rare non plus de constater qu’un nombre anormal de gamines de 14-15 ans arborent fièrement un sac Gucci ou des lunettes de soleil Versace. Dans une société où les parents se tuent au travail pour pouvoir offrir des cours du soir à leurs enfants, il est étonnant de penser que ces mêmes parents pourraient donner assez d’argent de poche à leur progéniture pour s’offrir ces produits de luxe… Cet état de chose découle de l’enjo-kôsai (faire connaissance pour aider, sortie pour soutenir). Des lycéennes sont payées par des hommes plus âgés pour les accompagner en sorties, parfois jusqu’à la prostitution.

Cette pratique n’est pas différente d’un petit boulot habituel, aux yeux des jeunes filles le pratiquant. C’est un moyen comme un autre d’obtenir de l’argent pour acheter les produits de la société de surconsommation japonaise. Les rendez-vous étaient à l’origine arrangés par les Telephone Clubs, composés de cabines où les hommes payaient pour recevoir un coup de téléphone d’une jeune fille. Plus tard, ils ont évolué : les hommes payaient pour obtenir le numéro de téléphone portable de la jeune fille. Après, la négociation ne concerne que les deux partis en présence, le client et la jeune fille.

Maintenant, tout passe par Internet, avec les forums d’annonces : le client dépose une simple annonce « Dîner + sexe à 50 000 yen » (400-500 euros) sur un forum dédié avec ses coordonnées et il n’aura plus qu’à faire son choix parmi les réponses qu’il recevra ; inversement, la jeune fille peut laisser son numéro et attendre qu’on la rappelle.

Aujourd’hui, le gouvernement japonais reconnait le phénomène et essaie de le limiter. En 1999, il fut déclaré illégal d’avoir un rapport sexuel payant avec un enfant de moins de 18 ans. Néanmoins, le paiement de l’enjo-kôsai consistant souvent en cadeaux, l’application de cette loi est bien difficile. Il faut aussi remarquer que l’âge de consentement sexuel au Japon est de 14 ans, ce qui indique que les relations sexuelles avec mineurs sont implicitement acceptées.

Les clients sont d’habitude d’âge moyen, mariés, avec des enfants. Beaucoup décrivent cette obsession d’une relation avec une jeune fille comme une attirance incontrôlable, qui semble socialement excuser le fait qu’ils exploitent une fille de l’âge de leur propre fille. Il est à noter qu’il existe tout de même certains clients qui ne paient ces filles que pour qu’elles jouent le rôle de leur propre fille, afin de compenser une sphère familiale souvent décomposée.
Le lolita complex (lolicon, attirance pour les jeunes filles) et le bura sera (la fascination érotique pour les écolières) qui revient si souvent dans les mangas et animes sont des piliers de la sexualité moderne japonaise. L’uniforme de marin (le sailor fuku, セーラー服) est un cliché de la pornographie japonaise, tandis qu’il existe des catalogues de jeunes filles posant en uniforme d’écolière, maillot de bain ou uniforme de sport. Sans oublier les distributeurs de petites culottes usagées…

Pour un observateur occidental, ces faits ne peuvent relever que de déviances sexuelles, absolument minoritaires dans la société japonaise. Ce discours ne tient pas compte de la spécificité de la société japonaise et de son rapport à la sexualité, absolument différent du point de vue occidental. Pour eux, ça n’a rien d’anormal ni de désaxé, c’est inhérent à leur culture.

Hentai et micro jupe

Conclusion

Dans ce contexte, il est difficile pour un occidental de juger les productions massives de figurines de jeunes adolescentes nues ou encore toute l’industrie du manga pornographique (hentai, 変態) contenant des scènes pédophiles. En effet, ce genre d’objets est décrié en Europe, alors qu’il est parfaitement intégré dans la culture japonaise, ce qui rend caduc tout débat sur sa légitimité : nous ne pouvons juger cela à moins de ne remettre en question toute la culture japonaise.

Un autre exemple de la parfaite intégration aux moeurs japonaises de ce qu’un occidental réprouverait, c’est l’utilisation de tous ces schémas sexuels dans la production visuelle japonaise : lorsqu’un manga se déroule dans un bar à hôtesses ou un soapland, ou évoque l’enjo-kôsai à travers un de ses personnages (GTO, Ikebukuro West Gate Park), ce n’est pas le sexe qui est au centre de l’histoire, ni la dimension scabreuse de l’objet narratif, mais l’auteur traite cela comme s’il traitait d’un personnage fleuriste ou d’un centre commercial. Ce qui nous choque autant, au final, ce n’est pas tant ces représentations et structures autour du sexe, mais le fait qu’elles soient aussi bien intégrées dans la société japonaise, qui n’a plus de problèmes à les représenter.

 

>> L’Histoire du Japon, les femmes fleurs (1/3)
>> L’Histoire du Japon, les femmes fleurs (2/3)

15 commentaires

Très intéressantes cette série d'articles. Il est vrai que les mangas mettent régulièrement en avant des situations qui pourraient paraître choquantes pour un européen lambda, mais deviennent déjà beaucoup plus compréhensibles après lecture de cette article.
Après, il faut quand même voir si l'aspect "culturel et traditionnel" (notamment dans ce qui est raconté dans le deuxième article) permettent de justifier encore aujourd'hui de telles pratiques, et ne risquent pas de mener à des abus (notamment sur mineures).
2 AngelMJ le 10/03/2009
Un triple dossier extrêmement intéressant, bien documenté et bien rédigé!

Cette dernière partie ne manque vraiment pas d'intérêt, et permet de mieux comprendre certains codes dans les animes/mangas qui parfois se heurtent à notre vision occidentale de la sexualité (le coup du magazine avec les hôtesses dedans... faut oser quand même ^^'').

Merci Sucre pour ton boulot, ça n'a pas dû être de tout repos :]
3 PanzerFaust le 10/03/2009
@Citation
En effet, ce genre d'objets est décrié en Europe, alors qu'il est parfaitement intégré dans la culture japonaise, ce qui rend caduc tout débat sur sa légitimité : nous ne pouvons juger cela à moins de ne remettre en question toute la culture japonaise

Mouais, enfin même le gouvernement japonais s'alarme que le Japon batte tous les records en matière de pédophilie, je sais pas si on peut dire que ça fait partie de la "culture" japonaise...
@PanzerFaust
Que ça te choque ou non, que ça ait une incidence ou non sur la pédophilie au Japon, les figurines d'adolescentes nues et les hentaï parfois plus que limites font indiscutablement partie de la culture japonaise. Ce que dit SucreDeLune, c'est que le rapport au sexe n'est pas le même qu'en France et qu'il est alors difficile de juger une culture lorsqu'on appartient à une autre culture, différente par bien des aspects.
5 SucreDeLune le 10/03/2009
@PanzerFaust
En écrivant cette troisième partie, je me suis trouvée sur une corde raide : bien, pas bien ?
Or, le jugement est impossible, car en tant que petite européenne moyenne je ne vois pas de quel droit je remettrais en question la législation d'un Etat (ce genre de produits sont légaux au Japon).

De plus, je vais profiter de ta remarque pour éclaircir mon propos et ajouter des choses que j'avais auparavant enlevées de l'article, pour ne pas l'alourdir.

Déjà, je me permets de t'inviter à lire ceci : Pornography, Rape and Sex Crimes in Japan
Il y est clairement souligné que les accusations comme quoi ce genre de produits, légal au Japon, risque d'augmenter les agressions envers les fillettes et les pré-adolescentes ne sont pas fondées sur des raisonnements tangibles. Au passage, je signale que les taux de ce type d'agression sont bien inférieurs à la plupart des autres pays.

De plus, la Cour des Nations Unies a déjà effectué la demande auprès du gouvernement japonais de faire interdire ces productions. Ils ont refusé, pour des motifs économiques, et rétorquant que cela était légal tant que des fillettes réelles n'étaient pas utilisées en tant que modèles. En mars 2008, l'UNICEF a renouvelé la demande, et est toujours dans l'attente d'une réponse officielle (officieusement, elle n'a pas changé).

Donc, tes propos malheureusement se fondent sur une opinion subjective largement répandue en Europe, qui se révèle fausse : il n'y a pas plus de crimes pédophiles au Japon qu'ailleurs, et le gouvernement japonais est bien loin de s'inquiéter de ce marché.

J'ajoute néanmoins que je ne défends aucunement ce genre de productions et qu'elle me dégoûte au plus au point ; mais nous sommes à des milliers de kilomètres de pratiques comme l'excision ou le mariage de fillettes de 6 ans à des hommes de 40.
Je viens tout juste d'y penser mais dans le manga Battle Royale, ce que fait Mitsuko Sôma et ses deux potes c'est aussi de l'enjo-kôsai ?

Sinon, Sucre ce dossier est génial et très éclairant sur ce pan de la société et de l'histoire japonaise. Y a encore une demi-heure je pensais que à part les geisha bref pas de femmes de joie au Japon...

Je me dis qu'en fait c'est même surprenant que cette culture n'agisse pas plus en soupape des fantasmes pédophiles. Je me serais attendu, à l'inverse de PanzerFaust, à ce que les crimes de pédophilie soient moins nombreux là-bas puisque les vrais pédophiles peuvent aussi en théorie profiter du phénomène enjo-kôsai pour "évacuer" leur frustration. Bon dit comme ça, c'est un peu rude mais j'espère que tu vois ce que je veux dire...

Encore une fois merci, c'était excellent ! Surtout la partie sur les femmes de réconfort. Je n'en avais jamais entendu parler.
7 SucreDeLune le 10/03/2009
Merci pour vos commentaires à tous sur ce dossier, ça me motive à travailler encore plus !

@Vit Zayder
Oui, je vois ce que tu veux dire (enfin je pense...). Néanmoins, j'estime que même si c'est admirable, se servir de ça comme thérapie, ça reste utopique. C'est se pencher à nouveau sur la frontière entre réalité et virtualité ; personnellement, de ce que j'ai pu lire, et de ce que je pense aussi, la réalité n'a rien à voir avec la virtualité... Si un maniaque veut violer un enfant, il le fera, malgré les images pédophiles qu'il aura à sa disposition. Admettre l'inverse, ce serait admettre que ce sont de vrais enfants qui sont représentés... Et là, c'est une limite infranchissable.
J'espère que ma réponse te satisfait é_è ?
Ouep je vois le truc...Pour beaucoup de pervers sexuels, le plaisir provient de la contrainte qu'ils exercent sur leurs victimes. Et cela rien ne peut le compenser...
Par contre je n'ai jamais dit que cela était admirable...Juste qu'en gros scientifique basique, je résonnais à tort mathématiquement mais comme tu le dis, ça reste utopique...

Ah une autre question, l'enjo-kôsai, c'est unisexe ? Je veux dire y at-il des mecs qui font ça ? Avec des femmes mûres ou d'autres mecs d'ailleurs ?
9 SucreDeLune le 10/03/2009
J'ai préféré laisser cela en suspens dans cette partie ; en effet, je n'ai RIEN trouvé, mais alors rien de rien... Toutes mes infos sur cette pratique évoquent des lycéennes, étudiantes. Néanmoins, ce n'est pas parce-que je n'ai rien trouvé qu'il n'y a rien ; je pense plutôt que c'est une pratique nettement plus limitée, pas un phénomène comme avec des lycéennes (après tout, il y a bien des hosts clubs masculins et les soapland masculins existent aussi même si beaucoup plus rares...). Bref, je ne peux malheureusement pas me prononcer dessus, sauf avec des hypothèses.
10 le gritche le 10/03/2009
"il n'y a pas plus de crimes pédophiles au Japon qu'ailleurs, et le gouvernement japonais est bien loin de s'inquiéter de ce marché."

L'important n'est pas de se dire qu'une adolescente de 14 ans a librement consenti à l'enjo-kôsai dans un but vénal mais de se demander quels effets cela peut provoquer dans son développement psychologique. Comment le prend-elle, comment la considère ses homologues masculins de sa classe, par exemple ?
11 SucreDeLune le 10/03/2009
Excellente question !

J'en profite pour vous donner le lien d'un témoignage qui m'a beaucoup touchée : Time Asia
Cette jeune fille l'a pratiqué et explique ce qu'elle en ressent. Déjà, elle avoue qu'elle ne pensait pas à mal, et qu'elle ne savait même pas qu'il y avait une loi contre (NB : elle était mineure au moment des faits, elle fait allusion à la loi des 18 ans). Ensuite, elle dit aussi que l'enjo-kosai n'est pas quelque chose dont on parle autour de soi ; elle ne sait pas si ses amies le pratique et n'en parle pas avec elles. Ce que j'ai remarqué aussi, c'était sa pudeur ; elle ne parle pas de traumatisme ou autre.

Je n'ose pas mettre le lien suivant, il s'agit d'une fiche wikipédia sur l'actrice X japonaise, Sally Yoshino. Je sais qu'il faut prendre avec des pincettes ce qu'il y a de wiki, mais je n'ai pu vérifier cette information nulle part ailleurs (excusez moi, les sites pornos japonais ne sont pas mes favoris...) : il y est expliqué qu'elle a été violée à 17 ans pendant un rendez-vous d'enjo-kosai, et qu'après elle a commencé à travailler dans le porno.
A nouveau, pas d'évocation de traumatisme ou de plainte ; juste une "cause à effet", qui reste quand même assez lourde à mes yeux...

La conclusion que j'en tire, c'est que dans une société où il y a encore 20 ans on pouvait avoir des relations sexuelles avec un mineur sans être inquiété (et encore aujourd'hui, si le mineur a plus de 13-14 ans selon les régions et s'il n'est pas payé, c'est légal), la notion de viol existe pas ou peu. Les victimes de viol n'en parlent pas, l'admettent et vivent avec. En fait, je pense qu'il faut traiter les chiffres de criminalité sexuelle japonaise avec précaution ; en effet, il est possible que les victimes ne se déclarent pas en tant que victimes. Un simple exemple : les hôtesses qui n'osent pas porter plainte et sont très peu reconnues par la justice... Les relations sexuelles sont vraiment vues différemment là-bas qu'en Europe, avoir un jugement là-dessus est impossible.
Néanmoins, le système judiciaire japonais évolue (2000, introduction de l'enregistrement vidéo de la plainte d'un mineur pour viol), les mentalités avec. Je ne peux que croiser les doigts pour que ça change progressivement.
12 ekmule le 11/03/2009
Un dossier très intéressant et très instructif. Du très bon boulot !!

Je comprends bien mieux maintenant ce décalage du point de vue que peut avoir un japonais et un occidental.

Cependant y a un paradoxe. Les japonais reste très coincé (je ne trouve pas le mot adéquate) à la base. Ils ont un code de politesse extrêmement développé etc.. Il suffit de voir les documentaires (très rares d’ailleurs) sur la vie en couple des japonais, ils ne se touchent même pas. Et en contre partie, il y a tout ce qui a été décrit dans ton dossier.

Agisse t il ainsi pour se rebeller contre ce trop plein de règle de conduite qui les étouffe et qui amplifie leurs désirs animales ? Ou est ce simplement le reste du puissant endoctrinement que le japon a vécu pendant de nombreux siècles qui commence à s’effriter ?

Je pencherai pour la seconde. Cependant je vois dans le japon moderne une évolution positive. Elle combat petit à petit ses défauts. Ne voit on pas une recherche de se remettre en question et de développer une sagesse nouvelle à cause de leur situation. N’essaye t il pas aussi de faire évoluer le statut de la femme qui devient de plus en plus égal au statu de l’homme. (Même si c’est très lent)

Nous sommes peut être choqué de la situation de leur point de vue sur la sexualité mais nous sommes aussi des observateurs d’une société qui se délivre d’elle-même des traditions, des idées reçus crées par leurs ancêtres.

Nous sommes aussi dans le même cas. N’oubliez pas que l’inceste chez nous, n’ai pas dans le code pénale de la France (je ne déconne pas) par exemple. (On a nos propres problèmes à combattre)
13 Elry le 15/03/2009
Vraiment, tu as eu bien raison de passer des semaines avec tes gourgandines! C'était très intéressant, vraiment, autant du point de vue historique que sociologique. Le commentaire du député sur les maisons de confort est assez sidérant, presque autant que la taille des semelles des ces getas (mon dieu, courir avec ces choses, c'est impossible, déjà que pour marcher sans risquer de se casser la jambe, c'est du travail...)

Je me demande si l'intégration par les Japonais de la prostitution et de l'enjokosai ne viendrait pas aussi d'une religion complètement différente: la culture judéo-chrétienne en Europe censure complètement le corps féminin et la sexualité en général... (toutefois, les femmes européennes tout comme les femmes japonaises ont souffert d'attitudes machistes)
Merci beaucoup pour ce très intéressant dossier.

PS: je vois que la lecture de Peacemaker t'a donné des exemples! :-)
14 topachook le 18/03/2009
Je ne sais pas si le on ne peu pas juger vaut dans ce cas ... je pense qu'il y a évidement des sociétés qui favorisent plus les déviances sexuelles que d'autres et c'est je crois franchement le cas du Japon ... le fait qu'il y ai des wagons spéciales pour les femmes afin de les protéger des pervers est révélateur par exemple.

Et bon tolérer des relations sexuelles pour des enfants de 13-14 ans je ne considère pas ça une spécificité national ... mais comme quelque chose de révélateur d'un vrais mal

Quand j'entends parler de distributeurs de culottes usagés, du sharking (des mecs qui viennent en courant pour retirer la culotte d'une fille en veillant à bien caméré la scène et la diffuser sur le net), de caméras cachés dans les vestiaires des filles, dans les bains publics ..... etc, etc ... je crois qu'il faut plutôt parler d'un mal japonais

Par contre la ou je suis totalement d'accord c'est que plusieurs animes qui peuvent nous sembler déviants à première vue se révèlent sous le jour de l'article de Sucre de juste représentations de la sociétés japonaises ..... les Mohiro Kitoh par exemple apparaissent sous un autre jour, le bals des perversions qu'on voit dans GTO ... etc. En tout cas même si juger la production d'animes et de manga devient différente après la ,lecture de l'article de Sucre, ça ne veux pas dire non plus que ce n'est pas de la perversion mais du contexte

J'ai beaucoup aimé ces articles et je tiens à souligner un point important sur la culture japonaise.
Le viol au japon est quelque chose de tabou pour une raison très simple, notre culture occidentale est basée sur la notion de "pêché", nous pouvons nous racheter et expier nos fautes.
Au japon, comme dans les autres cultures asiatiques, la société est basée sur la notion d'honneur. Une fois cet honneur perdu plus moyen de le retrouver.
Mourir avec ceux qui vous ont déshonoré est la voix la plus "noble", d'où les films où les héros meurent toujours après avoir fait payé ceux qui l'ont déshonoré, il n'y a pas de salut quand vous n'avez plus d'honneur, vous ne faite plus parti de la société et n'êtes plus reconnu par elle.
En clair si vous avouez avoir été violé, au Japon, vous perdez la face, vous êtes humilié et ceci à vie. Dans les manga on voit souvent des hommes faire pression sur les jeunes filles (jeunes hommes) violés avec des photos ou des vidéos de leur viol (qui pour nous seraient la preuve du crime), pour eux ils leur feront perdre l'honneur s'ils sont diffusés; cela est vécu comme quelque chose de pire que le viol lui-même.
La société japonaise connait autant de dépravation et de déviations sexuelles que les autres sociétés et les chiffres sur les agressions sexuelles sont évidemment faux à cause de la loi du silence, imbriquée dans leur culture même. Les victimes ne portent pas plainte pour ne pas perdre leur honneur et être humilié à vie.

Laisser un commentaire

Pour relier le webzine à votre compte AK, cliquez ici.

Contrairement au reste du site, le webzine a été développé sous Wordpress. Vous pouvez toutefois utiliser vos identifiant et mot de passe Anime-Kun habituels pour vous connecter. Cette opération est facultative mais vous permettra, lors de la première connexion, de relier votre compte AK à celui du Webzine et ainsi laisser des commentaires avec votre pseudonyme AK.

Pour des raisons de compatibilité, les membres dont l'identifiant comportent des caractères spéciaux ou accentués doivent utiliser l'adresse mail avec laquelle ils se sont inscrits sur Anime-Kun.

Connexion