Sound ! Euphonium - Avec tambour et trompette

» Critique de l'anime Sound! Euphonium (TV 1) par Rydiss le
10 Août 2015
Sound! Euphonium (TV 1) - Screenshot #1

A chaque fois que Kyoto Animation annonce un nouvel anime, c'est une débauche d'espoir et de crainte qui agite le milieu. Reconnu comme étant l'un des meilleurs studios du Japon, si ce n'est le meilleur, beaucoup se sont mis à douter suite à ses dernières productions. Quand on voit qu'il nous a offert des œuvres telles que Haruhi Suzumiya, Fullmetal Panic, Nichijô ou Lucky Star, et que quelques-unes ont laissé une empreinte dans l'animation japonaise, certains (moi compris) ont été sceptiques, voire déçus, à l'arrivée de productions purement divertissantes. Je pense à ces Amagi Brillant Park, ces Beyond the Boundary ou ces Chûnibyo, qui restent certes honnêtes dans leur genre (et encore, Beyond c'était foutu dès le premier épisode pour moi).

Sound! Euphonium (TV 1) - Screenshot #2Alors quand KyoAni prépare une nouvelle série mettant en vedette quatre jeunes filles évoluant dans le domaine de la musique, stupeur et tremblements. Allions-nous avoir droit à un nouveau K-On !, cet anime de KyoAni au succès monstrueux qui a aussi de nombreux détracteurs ? Allions-nous avoir de la pseudo-musique, des personnages reposant uniquement sur le concept de moe et de l'ennui ? Ou au contraire Kyoto Animation allait-il véritablement nous proposer une série différente, comme le disait le réalisateur Tatsuya ISHIHARA ? Allions-nous retrouver cette étincelle, ce petit plus propre au studio qui caractérise tous ses bons animes ?

Ne faisons pas durer le suspense plus longtemps. Oui, Sound ! Euphonium est une réussite. Oui, Sound ! Euphonium est l’une des meilleures séries de KyoAni.

Pour autant, ne crions pas à la révolution. Il reprend un domaine dans lequel il est devenu expert : la vie quotidienne option lycée. « Encore ! », ont soupiré un grand nombre, dont moi. C’est vrai. Explorer d’autres horizons a du bon pourtant, mais KyoAni a pour politique de ne faire que ce qui lui plaît. Cependant, est-ce une raison pour ne pas jeter un œil à Sound ! Euphonium ? Non, car vous passerez à côté d’une démonstration de maîtrise. Nous suivons donc Kumiko, une jeune fille qui vient d’entamer sa vie au lycée. Elle va entrer dans la fanfare de son établissement et y retrouver Kôsaka, une connaissance du collège avec laquelle elle est mal à l’aise… L’ambiance de la fanfare est loin d’être excellente, cependant elle compte bien aller au tournoi national, sous l’égide du professeur Taki.

Sound! Euphonium (TV 1) - Screenshot #3L’histoire, tirée d’un roman (et non d’un light novel, ce qui expliquerait sa qualité dirons les mauvaises langues…), est finalement on ne peut plus classique. On y retrouve un club, une ambiance scolaire, et une énième compétition inter-lycée et tout ce que cela implique d’entraînement, de rêves et doutes. Chose que nous proposent des centaines d’autres animes. Toutefois Sound ! Euphonium se démarque par une chose : le réalisme de son traitement.

C’est quelque chose qui frappera quiconque regardera la série : tout sonne vrai, naturel. Les situations, les personnages, leurs relations… Hormis deux trois trucs qui jouent légèrement la carte de l’exagération, tout est bon. Les personnages gagnent d’ailleurs énormément en intérêt grâce à ce traitement. Le casting est conséquent et varié, et il est rare de tomber dans le stéréotype. Il est à noter qu’en 13 épisodes les évolutions sont visibles, et ceci pour plusieurs de protagonistes. On sent qu’il y a un accomplissement. Quand on voit que des séries n’arrivent à rien avec leurs personnages principaux en une vingtaine d’épisodes, on a envie de pleurer tellement c’est bien fait…

L’exemple le plus frappant est bien évidemment Kumiko, notre jeune héroïne qui n’a pas sa langue dans sa poche (à son grand regret). Au départ introvertie, indécise, cachant sa nature sarcastique et ignorant sur quel pied danser, elle prendra de plus en plus d’assurance, s’ouvrira aux autres et ira même jusqu’à prendre des initiatives dont on ne l’aurait pas cru capable. Le deuxième protagoniste marquant est bien évidemment Kôsaka, déterminée à ne pas entrer dans le moule, mais qui va tout de même devoir apprendre à vivre avec les autres. Les réalisateurs ont d’ailleurs bien retranscrit cette volonté de se distinguer à travers la mise en scène : les scènes que je considérais comme exagérées lors du visionnage lui sont toutes attribuées et du coup se justifient. Que ce soit la pause « l’Oréal » où elle passe sa main dans les cheveux, la scène de nuit dans le parc avec cette robe blanche qui s’envole telle celle de Marylin Monroe alors qu’elle ne fait que s’asseoir, ses solo de trompette… Tout est fait pour souligner sa singularité. D’autres étudiantes tirent leurs épingles du jeu : Asuka et son charisme couplé à son ambivalence, Kaori et son travail acharné… Sans oublier Monsieur Taki, qui a le mérite d’être le professeur le plus crédible que j’ai pu voir depuis des années. Il ressemble d’ailleurs un peu à Kumiko par son franc-parler qui détonne.

Sound! Euphonium (TV 1) - Screenshot #4Tous ces personnages servent parfaitement l’histoire et surtout son thème principal : passer de l’adolescence à l’âge adulte, avec tout ce que cela implique. Les situations rencontrées mettent clairement en avant les notions de choix et de responsabilité, et ceci dès les premiers épisodes. Vous avez choisi d’atteindre le championnat national ? Eh bien assumez et bossez d’arrache-pied. On n’oublie pas ceux qui optent clairement pour une autre option, qui mène à une situation malheureuse mais encore une fois choisie et assumée. Sinon, faites comme Asuka : vous souhaitez n’avoir aucune responsabilité, eh bien ne prenez aucun engagement. N’oublions pas non plus les principes de priorité et l’importance du temps. Ajoutons à cela les notions d’échec et d’effort abordées via les terrifiantes auditions. L’injustice qui en découle est elle aussi abordée : les shônens auront beau clamer le contraire, ce n’est pas parce que vous donnez tout ce que vous avez que vous allez forcément y arriver… Le propos est ainsi riche, amené progressivement et surtout nous parle : nous avons tous vécu de telles situations et nous sommes posés les mêmes questions. Et très personnellement, j’ai trouvé particulièrement jouissif de voir des lycéens prétentieux se faire remettre à leur place. Great Teacher Taki inside.

Sound! Euphonium (TV 1) - Screenshot #5Si certains craignaient que le thème de la fanfare (ou plutôt l’harmonie-fanfare si on est à cheval sur les dénominations) reçoive le même traitement que la musique de K-On !, qu’ils soient rassurés : il n’en est rien. Encore heureux me direz-vous. Il est au cœur de la série et a été exploré dans ses moindres détails. Que ce soit les répétitions, les auditions, les défilés, tout est extrêmement bien documenté. Pour avoir dans mon entourage une ancienne musicienne de fanfare, je peux certifier que oui, un défilé se déroule exactement tel qu’il est montré. Même les costumes sont plutôt fidèles (rappelez-vous des majorettes et leurs mini-jupes qui sévissaient dans tous les villages de France. Ah, les années 70…). On notera bien évidemment les instruments et leur fidèle retranscription à l’écran, mais j’ai envie de dire : ça coulait de source avec KyoAni.

Il en devient même difficile de trouver un défaut à la réalisation. Le character-design est dans les canons du genre, certes, mais particulièrement soigné (chaque membre de la fanfare est clairement défini) et on retrouve la patte KyoAni (qui considère donc que les jambes sont ce qu’il y a de plus sexy chez la femme vu le soin qui leur a été accordé…). Sinon, encore une fois, les décors sont sublimes. Encore une fois, la photographie et autres jeux de lumière illuminent votre écran. Et encore une fois, l’animation explose tout quand elle est sollicitée. La course de Kumiko, personne ? Et les concerts où on va jusqu’à animer l’inclinaison du corps lorsqu’on souffle dans un instrument ? Et ces doigts qui s’agitent sur les touches des cuivres ? Certes, on remarque aussi des petits trucs pour s’économiser : les gros plans permettent de ne pas se focaliser sur les mouvements des mains, on montre les musiciens de dos… Mais jamais les instrumentistes ne sont montrés immobiles. Puis avec le concert final le studio envoie tout ce qu’il a, que ce soit via les gestes des percussionnistes ou du chef d’orchestre. Du grand art. Inutile d’évoquer la direction du son et la musique, elles sont à la hauteur d’un anime traitant de fanfare.

Sound! Euphonium (TV 1) - Screenshot #6Que d’éloges, pensez-vous. Certes. En fait, j’ai un défaut à souligner : la relation entre Kumiko et Kôsaka. Que l’on ne se méprenne pas : c’est un plaisir de suivre son évolution et on est ravi de voir cette amitié se muer en une relation de confiance absolue. Mais, il y a un mais. Ceux qui ont vu la série vont comprendre : bon Dieu, est-ce une relation amoureuse ou non ? Le traitement est ambigu et au final, mon ressenti est le suivant : franchement, que c’était pénible. Sur quel pied dansé ? Pourquoi autant jouer sur la confusion ? On nous montre des scènes qui me semblent tout droit sorti d’un fanzine shojo-ai. Cela ne me dérangerait pas de voir une relation homosexuelle, loin s’en faut. Le problème est que tout est désamorcé par une seule phrase. Du coup, ce qui suit me fait seulement penser à du fan-service grossier. Comme si rien n’était assumé. On neutralise mais on poursuit quand même sur notre lancée juste pour faire plaisir aux cupidons du dimanche. C’est d’autant plus dérangeant qu’après quelques recherches sur le roman, j'ai pu constater il n'y a rien pour appuyer une telle relation.

On pourra aussi me reprocher que j’imagine des choses, que ce ne sont que des démonstrations d’amitié profonde. Et ce doit être en parti vrai. Le problème étant que les productions japonaises nous montre rarement, voire jamais, de relations aussi franche. Alors forcément, dès qu’il y a du changement, je l’avoue, je vois du fan-service. Pour autant, malgré ma remise en question, impossible de me détacher de cette idée que tout cela n’est qu’une vaste fumisterie utilisée pour « faire style », sans rien assumer ni aller au bout de ce choix. Un comble quand on se souvient du thème principal de la série… Certains apprécieront, pour ma part c’est un procédé que je ne cautionne pas.

Mais cela restera bien le seul point noir. Car autrement, que reprocher ? Les treize épisodes sont parfaitement utilisés, le rythme est mené tambour battant sans pour autant aller plus vite que la musique, l’histoire a une conclusion qui se suffit très bien (mais on peut espérer une deuxième saison, hein ?), le traitement est optimal et les personnages sont excellents. Rien à reprocher non plus du côté de la réalisation, si ce n’est une certaine exagération pour quelques passages. Mais le fait est là : j’ai assidûment suivi la série, j’ai aimé suivre l’évolution des protagonistes, j’ai eu la gorge nouée lors des auditions, j’ai frissonné lors du concert final, j’ai angoissé avant l’annonce des résultats... Bref, j’ai vibré devant Sound ! Euphonium. Alors certes, c’est toujours la même chanson avec KyoAni. Mais quand c’est mené avec maestria, que c’est difficile de lui reprocher…

Verdict :8/10
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A propos de l'auteur

Rydiss, inscrit depuis le 15/07/2007.
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