Critique de l'anime Baccano!

» par Starrynight le
10 Février 2008
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Baccano! est un boucan du diable à travers les lieux et les époques, un déluge d’originalité et d’inventivité, un oasis de fraîcheur dans une production japonaise qui semble devenir de plus en plus commerciale et plate.

Tout commence par une scène se situant chronologiquement après la suite du récit qui serait donc un immense flash-back. Cet anime commence en fait par sa propre remise en question avec une jolie mise en abîme à la clef : quelle histoire vais-je raconter ou plutôt quelles histoires ? De quel protagoniste vais-je faire le personnage central ? La réponse est une absence de réponses : Baccano! a fait le choix de raconter plusieurs histoires entremêlées sans qu’une soit vraiment prépondérante par rapport aux autres. De plus, cet anime n’a pas un personnage principal, ni deux, mais une bonne quinzaine, sans parler des personnages secondaires qui ont parfois un rôle essentiel à jouer. Chacun est plus ou moins le héros d’une de ces histoires, mais encore une fois sans que l’un soit réellement mis en avant. Au lecteur de choisir, semble dire le scénariste : quelle histoire vais-je considérer comme centrale ? La quête de Szilard ? L’histoire du Rail Tracer ? La recherche de Dallas Genoard par sa petite sœur ? Les folles aventures d’Isaac et Milia, le couple de cambrioleurs le plus à l’ouest du XXème siècle ? Un conflit entre familles mafieuses à New-York en pleine époque de la Prohibition ? Autre chose ? Chacun son choix. Qui dit multiplicité de personnages principaux dit également multiplicité de points de vue : ainsi la même scène pourra apparaître plusieurs fois, mais vu par un personnage différent.

L’autre grande force de cet anime est son rapport à la chronologie, résolument brutal et tapageur. Au fil des épisodes, on ne cesse d’osciller entre 1711, 1930, 1931 et 1932. Ce maelström antichronologique est déroutant et vertigineux mais aussi enivrant et jouissif. En l’espace de deux secondes, on peut retrouver le même personnage à deux endroits radicalement différents, dans deux situations complètement déconnectées, car le compteur des années vient de changer. Baccano! invente ainsi le récit quantique : les personnages peuvent être dans deux états et dans deux endroits distincts quasi simultanément. C’est le récit et la vision qu’en a le spectateur qui vont déterminer la suite du traitement de ce personnage. Cette série abolit le temps : les quatre époques se renvoient sans cesse l’une à l’autre et finissent par se confondre, d’autant plus que l’ordre du récit n’a rien à voir avec l’ordre chronologique : certaines histoires commencent par la fin, d’autres en plein milieu et on en découvre petit à petit un événement antérieur ou postérieur à l’état de départ. C’est un immense cercle des karmas où chaque récit reboucle sur lui-même. L’action anodine d’un personnage va bouleverser le cours des événements d’un deuxième et influer sur celui d’un troisième … le tout en changeant sans cesse d’époque, de quoi donner le vertige.

Bien entendu, le récit en est d’autant plus difficile à suivre, ce qui pourrait décourager certains spectateurs, surtout dans les premiers épisodes assez abscons. Cependant, cette série sait susciter notre intérêt surtout grâce à son rythme qui reste soutenu du début jusqu’à la fin

L’histoire en elle-même mélange un cadre historique réel (les États-Unis, la Prohibition) avec des éléments surnaturels (pacte avec un démon, élixir d’immortalité). Le mélange s’opère bien.

Concernant les lieux de l’action, une trouvaille est d’avoir pris comme colonne vertébrale un train transcontinental, le Flying Pussyfoot, où se déroule à peu près la moitié de l’anime et où se croisent et s’entrecroisent quasiment toutes les forces en présence, chacune ayant son propre objectif différent de celui des autres, auquel s’ajoute un personnage terrifiant et à moitié surnaturel, le Rail Tracer, psychopathe sanguinaire de la pire espèce.

En fait beaucoup de personnages sont avant tout caractérisés par leurs violences : mafieux impitoyables, tueurs fous, immortels assoiffés de pouvoir. Le sang et la brutalité sont omniprésents et créent une ambiance parfois un peu gore, ce qui risque de déranger les adeptes de la dentelle de Bruges et du point de croix. Il faut reconnaître que toute cette violence paraît parfois trop gratuite et inutile.

Mais … les scénaristes ont sorti un nouveau lapin de leur chapeau de magicien (ils avaient vraiment plus d’un tour dans leur sac) : j’ai nommé Isaac et Milia, le duo de cambrioleurs. Eux vivent dans le pays des Bisounours et font volontairement dans la plus grande surenchère en matière de naïveté, d’optimisme et de bons sentiments. Aussi idiots qu’ils puissent paraître (et c’est peu dire), ils servent de gigantesque contrepoids à cette atmosphère de violence et de crimes en tout genre. Comment prendre au sérieux une série qui voit les quatre cents coups de deux abrutis pareils ?

Baccano! est donc un anime résolument à part, de part sa construction narrative, son traitement des personnages, son cadre et son ambiance. A ne pas manquer, malgré une ambiance parfois un peu trop sanglante.

Verdict :9/10
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A propos de l'auteur

Starrynight, inscrit depuis le 18/06/2006.
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